jeudi 28 novembre 2013

Les Dix Paroles de Dieu

En relisant l’ensemble des alliances, depuis celle avec Adam et Ève, puis avec Noé, avec Abraham et ses descendants, jusqu’à l’alliance du Sinaï, on peut rétrospectivement deviner le projet divin de communion universelle entre Dieu et les humains et même avec toute la création. Même s’il semble peu à peu se restreindre dans son amplitude, nous retrouvons dans les Dix Paroles remises par Dieu à son peuple des injonctions qui visent en fait tous les humains. Le dynamisme interne du plan de Dieu est mondial, car Dieu aime tous les humains et veut le salut de tous.
 
Voici ces Paroles données à Moïse et au peuple: « Je suis le Seigneur ton Dieu, qui t'ai fait sortir du pays d'Égypte, de la maison d'esclavage. Tu n'auras pas d'autres dieux que moi. Tu ne feras aucune idole […] Tu n'invoqueras pas le nom du Seigneur ton Dieu pour le mal, car le Seigneur ne laissera pas impuni celui qui invoque son nom pour le mal. Tu feras du sabbat un mémorial, un jour sacré. Pendant six jours tu travailleras et tu feras tout ton ouvrage; mais le septième jour est le jour du repos, sabbat en l'honneur du Seigneur ton Dieu : tu ne feras aucun ouvrage, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton serviteur, ni ta servante, ni tes bêtes, ni l'immigré qui réside dans ta ville. Car en six jours le Seigneur a fait le ciel, la terre, la mer et tout ce qu'ils contiennent, mais il s'est reposé le septième jour. C'est pourquoi le Seigneur a béni le jour du sabbat et l'a consacré. Honore ton père et ta mère, afin d'avoir longue vie sur la terre que te donne le Seigneur ton Dieu. Tu ne commettras pas de meurtre. Tu ne commettras pas d'adultère. Tu ne commettras pas de vol. Tu ne porteras pas de faux témoignage contre ton prochain. Tu ne convoiteras pas la maison de ton prochain; tu ne convoiteras pas la femme de ton prochain, ni son serviteur, ni sa servante, ni son bœuf, ni son âne : rien de ce qui lui appartient. » (Exode 20, 1-17)
 
Ces Paroles qui règlent les relations avec Dieu et entre les humains gardent leur valeur de guide, de lumière sur nos pas. Jésus ne les a pas abolies, mais accomplies, en révélant leur dynamisme interne dans les Béatitudes et le Sermon sur la Montagne. Ces Dix Paroles articulent l’adoration de l’unique Dieu et les façons de vivre d’un peuple qui sait que les idoles exigent toujours des larmes et du sang, brisent la fraternité et la paix.
 
Dans le texte biblique suivent une foule de prescriptions concrètes qui appliquent aux conditions de vie d’alors ces préceptes généraux et sont périmées. Mais déjà ces Dix Paroles guidaient le peuple dans ses relations humaines fondamentales qui valent encore pour nous aujourd’hui et rejoignent les grandes souffrances de notre époque. (4)
 
Retenons par exemple : « Tu ne molesteras pas l'étranger ni ne l'opprimeras, car vous-mêmes avez été étrangers dans le pays d'Égypte. Vous ne maltraiterez pas une veuve ni un orphelin. […]Tu ne colporteras pas de fausses rumeurs. Tu ne prêteras pas la main au méchant en témoignant injustement. Tu ne prendras pas le parti du plus grand nombre pour commettre le mal, ni ne témoigneras dans un procès en suivant le plus grand nombre pour faire dévier le droit. […] Tu n'accepteras pas de présents, car le présent aveugle les gens clairvoyants et ruine les causes des justes. Tu n'opprimeras pas l'étranger. Vous savez ce qu'éprouve l'étranger, car vous-mêmes avez été étrangers au pays d'Égypte. » (Exode 22, 20-21 à 23,9)
 
Ces règles éthiques fondamentales, et bien d’autres qu’on trouve aussi comme découlant des Dix Paroles, sont toujours d’une grande actualité, car elles expriment notre commune humanité et ses exigences de fraternité universelle. Elles méritent d’être méditées et appliquées parmi nous et dans tous les peuples.
(12e texte d’une série sur l’Alliance)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

jeudi 14 novembre 2013

L’alliance sur le Sinaï

Cette alliance sur le Sinaï est faite par Dieu qui s’est auparavant révélé à Moïse comme Celui qui accompagne les descendants d’Abraham, Isaac et Jacob pour les libérer d’Égypte. C’est une alliance avec ce petit peuple récemment sorti de l’esclavage, pauvre et humilié. Dieu veut en faire son instrument pour un jour manifester sa miséricordieuse bonté à tous les peuples de la terre. Avec l’alliance faite avec Abraham, nous avons là l’alliance la plus importante de l’Ancien Testament. Elle contient la promulgation des dix Paroles (Dix Commandements). Son influence dans l’histoire de toutes les nations est unique.
 
En voici la description : « Moïse vint rapporter au peuple toutes les paroles du Seigneur et tous ses commandements. Le peuple répondit d'une seule voix : “Toutes ces paroles que le Seigneur a dites, nous les mettrons en pratique.” Moïse écrivit toutes les paroles du Seigneur; le lendemain matin, il bâtit un autel au pied de la montagne, et il dressa douze pierres pour les douze tribus d'Israël. Puis il chargea quelques jeunes Israélites d'offrir des holocaustes, et d'immoler au Seigneur de jeunes taureaux en sacrifice de paix. Moïse prit la moitié du sang et le mit dans des bassins; puis il aspergea l'autel avec le reste du sang. Il prit le livre de l'Alliance et en fit la lecture au peuple. Celui-ci répondit : “Tout ce que le Seigneur a dit, nous le mettrons en pratique, nous y obéirons.” Moïse prit le sang, en aspergea le peuple, et dit : “Voici le sang de l'Alliance que, sur la base de toutes ces paroles, le Seigneur a conclue avec vous.” (Exode 24,3-8)
 
La communion entre Dieu et le peuple choisi fut célébrée par un banquet devant Dieu. Aaron et 70 représentants du peuple furent invités par Dieu à monter sur la montagne avec Moïse. "Ils virent le Dieu d'Israël. Sous ses pieds il y avait comme un pavement de saphir, aussi pur que le ciel même. Il ne porta pas la main sur les notables des Israélites. Ils contemplèrent Dieu puis ils mangèrent et burent.” (Exode 24,11-12)
 
Peu à peu, Israël a compris que Dieu parlait alors à toutes les générations à venir. Son actualité fut sans cesse renouvelée de génération en génération, en particulier dans de grandes célébrations cultuelles. Pour notre part, nous pouvons reconnaître là des paroles reprises par Jésus la veille de sa mort, lorsqu’il a institué l’eucharistie. L’alliance visée par Dieu traversera les siècles et les cultures de toutes sortes : Dieu veut un jour se faire connaître et accueillir dans la liberté de l’amour par tous les humains.
(11e texte d’une série sur l’Alliance)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

lundi 4 novembre 2013

L’alliance abrahamique et Moïse


Dieu, en donnant son alliance à Abraham, y incluait ses descendants. Mais que leur est-il advenu alors que pendant quatre-cents ans ils ont dû vivre dans le milieu païen de l’Égypte, y furent réduits en esclavage puis menacés de génocide?
 
« Les Israélites, gémissant de leur servitude, crièrent, et leur appel à l'aide monta vers Dieu, du fond de leur servitude.  Dieu entendit leur gémissement; Dieu se souvint de son alliance avec Abraham, Isaac et Jacob. Dieu vit les Israélites et Dieu connut... » (Exode 2, 23-25) Celui qui s’est fait connaître à leurs ancêtres n’a pas oublié. Telle est la fidélité de Dieu à son alliance, par-delà les siècles et les errances de ses alliés.
 
Moïse a essayé de libérer les siens. Mais ce fut l’échec et il devient un fuyard. Il prend une femme madianite, a  un enfant à qui il donne un nom qui exprime sa peine et sa nostalgie de réfugié. Et il essaie d'oublier! Mais Dieu le rejoint dans la solitude du Sinaï et se présente en retissant le fil des générations qui semblait à jamais brisé : « Je suis le Dieu de tes pères, le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac et le Dieu de Jacob. » (3,6)
 
Et Dieu lui fait une bouleversante confidence : « J'ai vu, j'ai vu la misère de mon peuple qui est en Égypte. J'ai entendu son cri devant ses oppresseurs; oui, je connais ses angoisses. Je suis descendu pour le délivrer de la main des Égyptiens et le faire monter de cette terre vers une terre plantureuse et vaste, vers une terre qui ruisselle de lait et de miel. » (3,7-8. Voir aussi 6,1-4) Les anciennes promesses sont toujours effectives.
 
Malgré les apparences, Dieu n’a pas oublié l’alliance donnée dans un élan de sa bienveillance : elle est toujours solide. Il se souvient. Il agit. Il appelle des collaborateurs. Et il n’oubliait pas non plus la finalité universelle de cette alliance qui semble ici se restreindre à un seul peuple. Nous lisons dans Ben Sirac (44, 19 à 45,1) qu’Abraham fit alliance avec Dieu, en incrusta le signe dans sa chair et lors de l'épreuve fut fidèle. « Dieu lui promit par serment de bénir toutes les nations en sa descendance, de la multiplier comme la poussière de la terre et d'exalter sa postérité comme les étoiles,  de leur donner le pays en héritage, d'une mer à l'autre, depuis le Fleuve jusqu'aux extrémités de la terre. À Isaac, à cause d'Abraham son père, il renouvela la bénédiction de tous les hommes; il fit reposer l'alliance sur la tête de Jacob. Il le confirma dans ses bénédictions et lui donna le pays en héritage […] Il fit sortir de lui un homme de bien qui trouva faveur aux yeux de tout le monde, bien‑aimé de Dieu et des hommes, Moïse, dont la mémoire est en bénédiction. »
 
En ces temps où nous vivons dans un contexte social et culturel où se multiplient les idoles et où il nous semble que beaucoup oublient ou méprisent l’alliance de leurs ancêtres, il est très précieux de nous souvenir que Dieu n’oublie pas. Il est fidèle. Il nous demande d'oser lui faire confiance. Il est capable, par des chemins que nous ignorons et au temps qui sera le sien, d’activer d’une façon neuve son alliance éternelle avec les humains. Car il veut leur salut et leur bonheur.
(10e texte d’une série sur l’Alliance)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau