mardi 29 janvier 2013

Vatican II et les médias

Il fut rapidement admis que le décret du concile sur les moyens de communication sociale ne fut pas une très grande source d’inspiration. Les évêques en étaient eux-mêmes conscients puisqu’ils ont donné un mandat spécial du concile à la commission qu’il venait de créer pour qu’elle publie une instruction pastorale avec l’aide d’experts de différents pays (par. 23). Il faudra attendre jusqu’en 1971 pour avoir ce texte intitulé : Communion et Progrès. Cette fois, le menu fut substantiel!

On y affirme d’abord que les buts essentiels de tous ces moyens de communication sont la communion et le progrès de la société. « L'Église considère ces moyens de communication comme des “dons de Dieu”. Selon l'intention de la Providence, ils doivent engendrer entre les hommes des rapports fraternels, susceptibles de favoriser son dessein de salut. » (par. 2)

Jésus y est présenté comme le parfait « communicateur ». « Devenu, par l'Incarnation, semblable à ceux qui devaient recevoir son message, il a proclamé celui-ci avec puissance et sans compromission, par ses paroles et par toute sa conduite, vivant au milieu de son peuple, adoptant la façon de s'exprimer et de penser conforme à son pays et à sa condition » (par. 11).

Y est exprimée une vision très positive de ces réalités. « Une nouvelle langue se trouve peu à peu élaborée, qui permet aux hommes de mieux se connaître et de se rencontrer plus facilement. Compréhension plus rapide, bonne volonté réciproque plus spontanée conduisent à leur tour vers la justice et la paix, la bienveillance et la bienfaisance, l'aide mutuelle, l'amour et finalement à la communion. Ainsi les médias figurent à bon droit parmi les ressources et les possibilités les plus efficaces dont l'homme peut user pour affermir la charité, elle-même source de communion. » (par. 12)

Les médias sociaux sont vus comme des facteurs de progrès humain. « Les moyens de communication sociale progressent avec une telle rapidité qu'ils font sauter les barrières dressées entre les hommes au gré des temps et des lieux. Ils se présentent comme facteurs d'un rapprochement plus étroit et plus stable. Grâce à eux, l'information fait sur-le-champ le tour du globe et permet de participer plus activement à la vie du monde d'aujourd'hui. » (par. 20) On les reconnait donc comme des instruments de choix dans l'œuvre du progrès humain et de l’unité planétaire.

Toutefois, « les moyens de communication reçoivent finalement leur valeur de l'usage qu'en fait la liberté humaine. » (par. 13) « Puisque c'est l'homme lui-même qui décide de la manière d'utiliser les inventions, les principes moraux qui les régissent reposent sur la juste considération de la dignité de l'être humain, appelé à participer à la société des fils adoptifs de Dieu » (par. 14). S’ouvre ici tout le champ très actuel et sans cesse débattu du rôle de l’éthique pour régler ces activités humaines.

On y aborde aussi des sujets toujours chauds, tels que l’opinion publique, le droit à l’information, le rôle de ces médias dans l’éducation, la culture et les loisirs, les genres artistiques, la publicité, la formation  des responsables en ce domaine,  qu'il s’agisse des producteurs ou des usagers.

On y traite aussi du rôle possible de ces instruments pour le développement des populations et des pays démunis, où ils peuvent devenir une source importante de progrès et d'unité. « Dans les pays en voie de développement et, en particulier, dans ceux où l'analphabétisme met un obstacle au progrès intégral, les moyens audio-visuels peuvent communiquer avec grande efficacité les connaissances qui tendent à améliorer l'agriculture, l'industrie et le commerce, à promouvoir l'hygiène. Ils peuvent également aider à développer la personne, à fortifier la vie familiale, les relations sociales et le sens civique. » (par. 95)

Cette instruction pastorale reste humble dans ses suggestions concrètes, prévoyant des évolutions énormes dans ce domaine ainsi que des possibilités alors encore inconnues, et qui en fait se révèlent de plus en plus à nous. Toutefois, ce texte reste une source de réflexion sur les valeurs essentielles qui y sont en jeu.
(27e texte d’une série sur Vatican II)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau