samedi 24 février 2018

Sexualité et érotisme au service de l’union du couple

Il existe certaines pathologies qui peuvent affecter gravement la sexualité et son sens humain. Telle est la satisfaction égoïste des désirs et des instincts; ou encore la réduction de l’autre à une chose qu’on utilise et qu’on jette. « Le corps de l’autre est fréquemment manipulé comme une chose que l’on garde tant qu’il offre de la satisfaction, et il est déprécié quand il perd son attrait. » (Pape François, La joie de l’amour, par. 153) De telles déviations du sens de la sexualité donnent comme résultat diverses formes d’abus, de perversion et de violence sexuelle. De telles attitudes ou comportement tuent la dignité de l’autre.
 
De telles manipulations peuvent aussi se produire dans le mariage. Quelles en sont les conséquences? L’acte conjugal imposé au conjoint n’est pas alors un véritable acte d’amour. Il ruine les justes rapports entre les époux. Car les relations sexuelles dans le couple doivent être vécues dans un commun accord et donc dans un dialogue respectueux.
 
S’il doit être clair que toute forme de soumission sexuelle doit être rejetée, il faut aussi affirmer nettement que « le rejet des déviations de la sexualité et de l’érotisme ne devrait jamais nous conduire à les déprécier ni à les négliger. L’idéal du couple ne peut pas se définir seulement comme une donation généreuse et sacrifiée, où chacun renonce à tout besoin personnel et se préoccupe seulement de faire du bien à l’autre sans aucune satisfaction. Rappelons qu’un véritable amour sait aussi recevoir de l’autre, qu’il est capable de s’accepter comme vulnérable et ayant des besoins, qu’il ne renonce pas à accueillir avec sincérité et joyeuse gratitude les expressions corporelles de l’amour à travers la caresse, l’étreinte, le baiser et l’union sexuelle. » (Pape François, La joie de l’amour, par. 157) Chaque conjoint doit et donner à l’autre et recevoir de l’autre.
 
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau
(30e texte d’une série sur La joie de l’amour)

vendredi 16 février 2018

L’amour érotique dans le mariage

Désirs, sentiments et émotions ont une grande place dans le mariage. Ils ne sont pas bons ou mauvais en eux-mêmes. Tout dépend de ce que nous en faisons, comment nous les orientons, quels sont les actes qui en découlent. Certaines émotions sont entretenues pour faire du bien à l’autre. Mais nos sentiments et désirs peuvent aussi être voulus pour lui faire du mal. La source du bien ou du mal, pour nos sentiments, passions, émotions se trouve dans la qualité de l’amour qui est dans notre cœur et dans la maîtrise de soi qu’on a développé.
 
Le pape François dans son grand texte sur La joie de l’amour affirme : « L’amour matrimonial conduit à ce que toute la vie émotionnelle devienne un bien pour la famille et soit au service de la vie commune. Une famille arrive à maturité quand la vie émotionnelle de ses membres se transforme en une sensibilité qui ne domine ni n’obscurcit les grandes options et les valeurs, mais plutôt qui respecte la liberté de chacun, jaillit d’elle, l’enrichit, l’embellit et la rend plus harmonieuse pour le bien de tous. »
 
L’érotisme a sa place dans cet amour. Mais, pour éviter sa divinisation qui serait une déformation destructrice qui le priverait de sa dignité et le déshumanise, il faut une éducation de l’émotivité et de l’instinct. On peut alors « réaliser un beau parcours avec les passions, ce qui signifie les orienter toujours davantage dans un projet de don de soi et d’épanouissement personnel intégral qui enrichisse les relations entre les membres de la famille. Cela n’implique pas de renoncer à des moments de bonheur intense, mais de les assumer comme entrelacés avec d’autres moments de don généreux, d’attente patiente, de fatigue inévitable, d’effort pour un idéal. La vie en famille est tout cela et mérite d’être vécue entièrement. » (Pape François, La joie de l’amour)
 
Dieu nous a créés capable de jouissance et veut que nous épanouissions toutes les possibilités qu’il nous a données. Il nous veut heureux, il veut que nous laissions jaillir la joie face à la tendresse de l’autre. Mais il ne faut pas limiter notre amour à sa dimension érotique. Il faut savoir que le plaisir peut trouver d’autres formes d’expression dans les différents moments de la vie.
 
Il importe de ne pas réduire la sexualité à un moyen de satisfaction ou à un divertissement. Elle est un langage, une relation avec une autre personne qui doit être prise au sérieux et respectée. La sexualité « est non seulement une source de fécondité et de procréation », mais elle comprend « la capacité d’exprimer l’amour : cet amour dans lequel précisément l’homme-personne devient don. » (Jean-Paul II) Aussi, « l’érotisme le plus sain, même s’il est lié à une recherche du plaisir, suppose l’émerveillement, et pour cette raison il peut humaniser les pulsions. » (Pape François)
 
En somme, la dimension érotique de l’amour est un don de Dieu qui embellit la rencontre des époux, enrichit la vie du couple et de la famille, rend capable du don de soi dans la joie de l’amour.
 
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau
(29e texte d’une série sur La joie de l’amour)

samedi 10 février 2018

Qui est le lépreux?

L’histoire du lépreux qui rencontre Jésus est une image forte de la grande compassion du Christ envers les personnes blessées et marginalisées, spécialement en cette Journée mondiale du malade. Alors que la société mettait à l’écart le lépreux, Jésus se fait accueillant, lui touche et le purifie. L’Église doit être comme un hôpital de campagne répète souvent le pape François.  
 
Aujourd’hui, qui est le lépreux de notre époque? Ne serait-il pas dans l’itinérant rencontré dans une station de métro ou sur la rue? Ne serait-il pas dans cette personne âgée malade et seule, ou encore dans ce jeune dont la vie est sans espoir? Ne serait-il pas dans ce réfugié qui tente de fuir la guerre à la recherche d’un monde meilleur pour lui et les siens? Sous le regard du lépreux d’hier et d’aujourd’hui se cache le regard d’un enfant aimé de Dieu qui est unique. Sa dignité est plus forte que la maladie ou son état de vie.
 
Si Jésus nous invite à dépasser nos peurs et nos préjugés, son message est également une invitation à la compassion pour les personnes fragilisées de notre monde, pas uniquement de notre communauté locale, mais du grand village planétaire. L’accueil du lépreux d’aujourd’hui est un témoignage réel de l’action de l’amour du Christ pour notre humanité. 
 
René Laprise
Diacre permanent

(Ce texte a été publié dans la chronique Échos de la Parole de l'Office de catéchèse du Québec)

samedi 3 février 2018

Un dialogue qui valorise et construit

« Le dialogue est une manière privilégiée et indispensable de vivre, d’exprimer et de faire mûrir l’amour, dans la vie matrimoniale et familiale. » C’est par cette affirmation que le pape François  (La joie de l’amour) commence un long développement sur le dialogue, sa signification, son importance, sa capacité d’humaniser les relations humaines, de dépasser les incompréhensions, de guérir les blessures, de réchauffer l’amour, de retisser une communion qui s’effrite.
 
Le dialogue crée des ponts, abat des murs, brise l’isolement, ouvre au monde de l’autre, transforme et purifie le cœur.
 
Le dialogue implique une écoute mutuelle qui permet à chacun de s’exprimer, de s’expliquer dans un climat de douceur, d’écoute, de confiance.
 
Une condition fondamentale du dialogue est de ne pas entretenir la volonté d’imposer à tout prix son point de vue. Cette ouverture permet une réelle écoute de l’autre, sans l’interrompre. Il faut permettre à l’autre de finir ce qu’il a à dire. Agir autrement est non seulement un manque de respect, mais une agression. Le dialogue exige qu’on accorde une réelle importance à l’autre.
 
Le dialogue exige que chacun apprenne à s’exprimer sans blesser. Il faut surveiller quel langage on emploie et comment, avec quels accents ou gestes on s’exprime. Il est essentiel d’éviter un langage qui agresse, ironise, culpabilise, humilie.
 
« N’oubliez pas : dialoguer signifie écouter ce que me dit l’autre et dire avec douceur ce que je pense. Si les choses se déroulent ainsi, la famille, le quartier, le lieu de travail seront meilleurs. Mais si je ne laisse pas l’autre dire tout ce qu’il a sur le cœur et que je commence à hurler — aujourd’hui on hurle beaucoup — cette relation entre nous ne se terminera pas bien; la relation entre mari et femme, entre parents et enfants ne se terminera pas bien. Écouter, expliquer, avec douceur, ne pas crier contre l’autre, ne pas hurler, mais avoir un cœur ouvert. »  (Pape François, Audience jubilaire)
 
L’amour libère de la peur de l’autre et surpasse les pires barrières. Il ouvre le cœur par l’humilité. Il guérit les blessures par la douceur. Il ouvre les oreilles et rend disponible pour accueillir l’autre, pour comprendre ses sentiments. Il purifie la bouche pour se dire avec confiance et paix dans le cœur. Il change le regard et fait voir les beautés invisibles au-dessous des apparences choquantes ou changeantes. Il fait toujours espérer et croire que l’autre peut changer, mais aussi que moi-même je peux m’améliorer. En somme, l’amour assure qu’il y a un avenir, quoi qu’il arrive.
 
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau
(28e texte d’une série sur La joie de l’amour)