jeudi 30 octobre 2014

La force missionnaire de l’intercession

Le pape François (dans La joie de l’Évangile par. 281ss) nous enseigne une forme de prière qui nous stimule au don de nous-mêmes pour l’évangélisation et nous motive à chercher le bien des autres : c’est l’intercession. Il nous donne en exemple saint Paul. Sa prière était remplie de personnes : « En tout temps dans toutes mes prières pour vous tous […] car je vous porte dans mon cœur » (Ph 1, 4.7).
 
Puis le pape note que cette attitude se transforme aussi en remerciement à Dieu pour les autres : « Et d’abord je remercie mon Dieu par Jésus Christ à votre sujet à tous » (Rm 1, 8). C’est un remerciement constant : « Je rends grâce à Dieu sans cesse à votre sujet pour la grâce de Dieu qui vous a été accordée dans le Christ Jésus » (1 Co 1,4); « Je rends grâce à Dieu chaque fois que je fais mémoire de vous » (Ph 1, 3).
 
Pour développer ces deux formes de prières (intercession et remerciement), il faut développer en nous un certain regard. « Ce n’est pas un regard incrédule, négatif et privé d’espérance, mais bien un regard spirituel, de foi profonde, qui reconnaît ce que Dieu même fait en eux. En même temps, c’est la gratitude qui vient d’un cœur vraiment attentif aux autres. De cette manière, quand un évangélisateur sort de sa prière, son cœur est devenu plus généreux, il s’est libéré de l’isolement et il désire faire le bien et partager la vie avec les autres. »
 
« Nous pouvons dire que l’intercession émeut le cœur de Dieu, mais, en réalité, c’est lui qui nous précède toujours, et ce que nous sommes capables d’obtenir par notre intercession c’est la manifestation, avec une plus grande clarté, de sa puissance, de son amour et de sa loyauté au sein de son peuple. »
(46e texte d’une série sur la joie)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

samedi 18 octobre 2014

L’action mystérieuse du Ressuscité et de son Esprit

Dans La joie de l’Évangile (par. 275ss.), le pape François commente diverses attitudes négatives vécues en Église : pessimisme, fatalisme, méfiance. Certaines personnes ne se donnent pas à la mission parce qu’elles croient que rien ne peut changer. «Cette attitude est précisément une mauvaise excuse pour rester enfermés dans le confort, la paresse, la tristesse de l’insatisfaction, le vide égoïste. »
 
Les premiers disciples allèrent prêcher, « le Seigneur agissant avec eux et confirmant la Parole » (Mc16, 20). Cela s’accomplit aussi de nos jours. Le Christ ressuscité nous invite à le connaître, à vivre avec lui. Il est « la source profonde de notre espérance, et son aide ne nous manquera pas dans l’accomplissement de la mission qu’il nous confie. (…) Sa résurrection n’est pas un fait relevant du passé; elle a une force de vie qui a pénétré le monde. Là où tout semble être mort, de partout, les germes de la résurrection réapparaissent. C’est une force sans égale. » Notre défi est d’y croire de tout notre cœur.
 
La foi signifie croire en Jésus, croire, qu’il est vivant, qu’il nous aime vraiment, qu’il ne nous abandonne pas, qu’il tire le bien du mal par sa puissance et sa créativité infinie, qu’il marche victorieux avec nous dans l’histoire.  « La résurrection du Christ produit partout les germes de ce monde nouveau; et même s’ils venaient à être taillés, ils poussent de nouveau, car la résurrection du Seigneur a déjà pénétré la trame cachée de cette histoire, car Jésus n’est pas ressuscité pour rien. Ne restons pas en marge de ce chemin de l’espérance vivante ! »
 
« La mission n’est pas un commerce ni un projet d’entreprise, pas plus qu’une organisation humanitaire, ni un spectacle pour raconter combien de personnes se sont engagées grâce à notre propagande; elle est quelque chose de beaucoup plus profond, qui échappe à toute mesure. (…) L’Esprit Saint agit comme il veut, quand il veut et où il veut; nous nous dépensons sans prétendre, cependant, voir des résultats visibles. Nous savons seulement que notre don de soi est nécessaire. Apprenons à nous reposer dans la tendresse des bras du Père, au cœur de notre dévouement créatif et généreux. Avançons, engageons-nous à fond, mais laissons-le rendre féconds nos efforts comme bon lui semble. »
 
Cette attitude demande une confiance ferme en l’Esprit Saint, à alimenter dans la prière. « Il est vrai que cette confiance en l’invisible peut nous donner le vertige : c’est comme se plonger dans une mer où nous ne savons pas ce que nous allons rencontrer. Moi-même j’en ai fait l’expérience plusieurs fois. Toutefois, il n’y a pas de plus grande liberté que de se laisser guider par l’Esprit, en renonçant à vouloir calculer et contrôler tout, et de permettre à l’Esprit de nous éclairer, de nous guider, de nous orienter, et de nous conduire là où il veut. Il sait bien ce dont nous avons besoin à chaque époque et à chaque instant.»
 
Est-ce que j’entretiens par la prière la certitude de l’action de Jésus Ressuscité et de son Esprit dans ma vie et dans mon engagement dans l’Église et dans le monde?
(45e texte d’une série sur la joie)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

vendredi 10 octobre 2014

Le plaisir spirituel d’être un peuple

Le pape François nous étonne toujours par ses audacieuses initiatives pour se faire proche de tous, surtout des pauvres de toutes catégories. Dans La joie de l’Évangile (par. 268ss), il explicite les raisons évangéliques de ce style apostolique.  Pour être d’authentiques évangélisateurs, il faut développer « le goût spirituel d’être proche de la vie des gens, jusqu’à découvrir que c’est une source de joie supérieure. » Car en regardant Jésus en Croix, « nous redécouvrons qu’il veut se servir de nous pour devenir toujours plus proche de son peuple aimé. »
 
L’Évangile nous montre Jésus proche de tous. « Quand il parlait avec une personne, il la regardait dans les yeux avec une attention profonde pleine d’amour : “Jésus fixa sur lui son regard et l’aima” (Mc 10, 21). Nous le voyons accessible, quand il s’approche de l’aveugle au bord du chemin (cf. Mc 10, 46-52), et quand il mange et boit avec les pécheurs (cf. Mc 2, 16), sans se préoccuper d’être traité de glouton et d’ivrogne (cf. Mt 11, 19). Nous le voyons disponible quand il laisse une prostituée lui oindre les pieds (cf. Lc 7, 36-50) ou quand il accueille de nuit Nicodème (cf. Jn 3,1-15). Le don de Jésus sur la croix n’est autre que le sommet de ce style qui a marqué toute sa vie. »
 
François nous invite à nous laisser séduire par ces exemples. Jésus veut que nous touchions la misère humaine, la chair souffrante des autres, que nous entrions en contact avec l’existence concrète des autres et que nous connaissions « la force de la tendresse.» Alors, « nous voulons nous intégrer profondément dans la société, partager la vie de tous et écouter leurs inquiétudes, collaborer matériellement et spirituellement avec eux dans leurs nécessités, nous réjouir avec ceux qui sont joyeux, pleurer avec ceux qui pleurent et nous engager pour la construction d’un monde nouveau, coude à coude avec les autres. »
 
L’œuvre d’évangélisation enrichit alors l’esprit et le cœur, « nous ouvre des horizons spirituels, nous rend plus sensibles pour reconnaître l’action de l’Esprit, nous fait sortir de nos schémas spirituels limités. En même temps, un missionnaire pleinement dévoué expérimente dans son travail le plaisir d’être une source, qui déborde et rafraîchit les autres. (…) Personne ne vit mieux en fuyant les autres, en se cachant, en refusant de compatir et de donner, en s’enfermant dans le confort. Ce n’est rien d’autre qu’un lent suicide. »
 
« Brisons les murs, pour que notre cœur se remplisse de visages et de noms! »
 
Est-ce là un programme que je veux et peux mettre en application? Quel est le pas que je suis appelé à faire aujourd’hui en ce sens?
(44e texte d’une série sur la joie)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

jeudi 2 octobre 2014

La rencontre personnelle avec l’amour de Jésus

« La première motivation pour évangéliser est l’amour de Jésus que nous avons reçu, l’expérience d’être sauvés par lui qui nous pousse à l’aimer toujours plus. Mais, quel est cet amour qui ne ressent pas la nécessité de parler de l’être aimé, de le montrer, de le faire connaître? Si nous ne ressentons pas l’intense désir de le communiquer, il est nécessaire de prendre le temps de lui demander dans la prière qu’il vienne nous séduire. » Ainsi s’exprime le pape François dans La joie de l’Évangile (par. 264).
 
La meilleure motivation pour se décider à communiquer l’Évangile est de le contempler avec amour, de s’attarder en ses pages et de le lire avec le cœur. « Toute la vie de Jésus, sa manière d’agir avec les pauvres, ses gestes, sa cohérence, sa générosité quotidienne et simple, et finalement son dévouement total, tout est précieux et parle à notre propre vie. »
« L’Évangile répond aux nécessités les plus profondes des personnes, parce que nous avons tous été créés pour ce que l’Évangile nous propose : l’amitié avec Jésus et l’amour fraternel. » Il est un trésor de vie et d’amour. « Notre tristesse infinie ne se soigne que par un amour infini. »
 
Il importe de goûter soi-même cette amitié de Jésus et son message. « On ne peut persévérer dans une évangélisation fervente, si on n’est pas convaincu, en vertu de sa propre expérience, qu’avoir connu Jésus n’est pas la même chose que de ne pas le connaître, que marcher avec lui n’est pas la même chose que marcher à tâtons, que pouvoir l’écouter ou ignorer sa Parole n’est pas la même chose, que pouvoir le contempler, l’adorer, se reposer en lui, ou ne pas pouvoir le faire n’est pas la même chose. » Le véritable missionnaire  « sait que Jésus marche avec lui, parle avec lui, respire avec lui, travaille avec lui. Il ressent Jésus vivant avec lui au milieu de l’activité missionnaire. Si quelqu’un ne le découvre pas présent au cœur même de la tâche missionnaire, il perd aussitôt l’enthousiasme et doute de ce qu’il transmet, il manque de force et de passion. Et une personne qui n’est pas convaincue, enthousiaste, sûre, amoureuse, ne convainc personne. »
 
Ai-je été séduit par Jésus? Ça a changé ma vie? Ça me donne le besoin intime d’en parler, de le faire connaître?
(43e texte d’une série sur la joie)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau