lundi 28 septembre 2015

Foi et environnement

De plus en plus de scientifiques identifient les liens entre une consommation exacerbée, un usage intense des carburants fossiles, la détérioration de la planète et la situation dramatique des personnes et des pays pauvres.
 
Le pape François montre ces liens de multiples façons dans sa récente encyclique. Il y cherche certes un dialogue avec tous les humains « pour chercher ensemble des chemins de libération. » Mais il affirme : « Je veux montrer dès le départ comment les convictions de la foi offrent aux chrétiens, et aussi à d’autres croyants, de grandes motivations pour la protection de la nature et des frères et sœurs les plus fragiles. » (64) Le seul fait d’être des humains pousse les personnes à prendre soin de l’environnement dont elles font partie. Mais les chrétiens doivent savoir « que leurs devoirs à l’intérieur de la création et leurs devoirs à l’égard de la nature et du Créateur font partie intégrante de leur foi ». Et le pape en conclut : « Donc, c’est un bien pour l’humanité et pour le monde que nous, les croyants, nous reconnaissions mieux les engagements écologiques qui jaillissent de nos convictions. »
 
Nos convictions de foi doivent avoir un impact sur notre façon de vivre nos relations avec l’ensemble de la nature, les autres vivants, les humains et en particulier les plus pauvres. Il faut y développer respect, responsabilité et courageuse espérance.
 
Nous sommes appelés à reconnaitre que chaque être vivant a une valeur propre devant Dieu. « Les différentes créatures, voulues en leur être propre, reflètent, chacune à sa façon, un rayon de la sagesse et de la bonté infinies de Dieu. C’est pour cela que l’homme doit respecter la bonté propre de chaque créature pour éviter un usage désordonné des choses » (69)
 
« Louez-le Soleil et Lune, louez-le, tous les astres de lumière; louez-le, cieux des cieux, et les eaux par-dessus les cieux! Qu’ils louent le nom du Seigneur : lui commanda et ils furent créés » (Ps 148, 3-5).
 
Laissons-nous entrainer dans cet hymne de louanges! Une telle attitude oriente notre coeur vers des engagements nouveaux.
 
(13e texte d'une série sur l'encyclique du pape François)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

samedi 19 septembre 2015

Caïn, Noé et la nature

« L’homme doit respecter la bonté propre de chaque créature pour éviter un usage désordonné des choses », affirme le pape François. Divers récits bibliques montrent la vérité de cette affirmation.
 
« Dans le récit concernant Caïn et Abel, nous voyons que la jalousie a conduit Caïn à commettre l’injustice extrême contre son frère. Ce qui a provoqué à son tour une rupture de la relation entre Caïn et Dieu, et entre Caïn et la terre dont il a été exilé. Ce passage est résumé dans la conversation dramatique entre Dieu et Caïn. Dieu demande : “Où est ton frère Abel?”. Caïn répond qu’il ne sait pas et Dieu insiste : “Qu’as-tu fait? Écoute le sang de ton frère crier vers moi du sol! Maintenant, sois maudit et chassé du sol fertile” (Gn 4, 9-11). La négligence dans la charge de cultiver et de garder une relation adéquate avec le voisin, envers lequel j’ai le devoir d’attention et de protection, détruit ma relation intérieure avec moi-même, avec les autres, avec Dieu et avec la terre. » (70)
 
« Quand toutes ces relations sont négligées, quand la justice n’habite plus la terre, la Bible nous dit que toute la vie est en danger. C’est ce que nous enseigne le récit sur Noé, quand Dieu menace d’exterminer l’humanité en raison de son incapacité constante à vivre à la hauteur des exigences de justice et de paix : “La fin de toute chair est arrivée, je l’ai décidé, car la terre est pleine de violence à cause des hommes” (Gn 6, 13). Dans ces récits si anciens, emprunts de profond symbolisme, une conviction actuelle était déjà présente : tout est lié, et la protection authentique de notre propre vie comme de nos relations avec la nature est inséparable de la fraternité, de la justice ainsi que de la fidélité aux autres. »
 
Suis-je conscient de la nécessité vitale de ces relations de fraternité, de justice et de fidélité et de leurs interrelations pour notre survie et celle de toute la vie sur la planète-terre?
 
(12e texte d'une série sur l'encyclique du pape François)

† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

vendredi 11 septembre 2015

La Bible et le soin de la terre

On entend l’affirmation que l’écologie n’a rien à voir avec la foi. Le pape François pense le contraire. Et il développe dans un très long chapitre les « raisons qui se dégagent de la tradition judéo-chrétienne, afin de donner plus de cohérence à notre engagement en faveur de l’environnement. » Car « la science et la religion, qui proposent des approches différentes de la réalité, peuvent entrer dans un dialogue intense et fécond pour toutes deux » (62) La foi chrétienne offre « de grandes motivations pour la protection de la nature et des frères et sœurs les plus fragiles. » (64)
 
« Les récits de la création dans le livre de la Genèse contiennent, dans leur langage symbolique et narratif, de profonds enseignements sur l’existence humaine et sur sa réalité historique. Ces récits suggèrent que l’existence humaine repose sur trois relations fondamentales intimement liées : la relation avec Dieu, avec le prochain, et avec la terre. » (66) Le péché a rompu ces relations. « L’harmonie entre le Créateur, l’humanité et l’ensemble de la création a été détruite par le fait d’avoir prétendu prendre la place de Dieu, en refusant de nous reconnaître comme des créatures limitées. »
 
La relation entre l'être humain et la nature est devenue conflictuelle. L’être humain est devenu dominateur et destructeur de la nature dans une exploitation sauvage. Pourtant ce n’est pas la mission donnée à l’homme selon les textes bibliques. Ils nous invitent à « cultiver et garder » le jardin du monde. « Alors que “cultiver” signifie labourer, défricher ou travailler, “garder” signifie protéger, sauvegarder, préserver, soigner, surveiller. Cela implique une relation de réciprocité responsable entre l’être humain et la nature. Chaque communauté peut prélever de la bonté de la terre ce qui lui est nécessaire pour survivre, mais elle a aussi le devoir de la sauvegarder et de garantir la continuité de sa fertilité pour les générations futures. »
 
Cette position biblique appelle une ferme révision de nos habitudes d’exploiter la terre, que ce soit mon petit jardin ou d’immenses mines à l’autre bout de la planète.
 
(11e texte d'une série sur l'encyclique du pape François)

† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

vendredi 4 septembre 2015

Agressions environnementales et agressions sur les pauvres

« L’environnement humain et l’environnement naturel se dégradent ensemble », affirme le pape François dans son document sur l’écologie (48). Dégradations de la planète, sociale et humaine se tiennent. Et ce sont les pauvres qui en souffrent le plus. « Par exemple, l’épuisement des réserves de poissons nuit spécialement à ceux qui vivent de la pêche artisanale et n’ont pas les moyens de la remplacer; la pollution de l’eau touche particulièrement les plus pauvres qui n’ont pas la possibilité d’acheter de l’eau en bouteille, et l’élévation du niveau de la mer affecte principalement les populations côtières appauvries qui n’ont pas où se déplacer. »
 
« Aujourd’hui, nous ne pouvons pas nous empêcher de reconnaître qu’une vraie approche écologique se transforme toujours en une approche sociale, qui doit intégrer la justice dans les discussions sur l’environnement, pour écouter tant la clameur de la terre que la clameur des pauvres. » (49)
 
L’inégalité entre riches et pauvres n’affecte pas seulement les individus, mais aussi des pays entiers « et oblige à penser à une éthique des relations internationales. » Cela concerne en particulier les rations entre le Nord et le Sud : déséquilibres commerciaux, utilisation disproportionnée des ressources naturelles, exportations pour satisfaire les marchés du Nord et dommages ainsi causés comme pollution par le mercure ou par le dioxyde de souffre. « Le réchauffement causé par l’énorme consommation de certains pays riches a des répercussions sur les régions les plus pauvres de la terre, spécialement en Afrique, où l’augmentation de la température jointe à la sécheresse fait des ravages au détriment du rendement des cultures. »
 
Après l’énumération de très nombreux autres exemples, le pape en conclut : « Il faut maintenir claire la conscience que, dans le changement climatique, il y a des responsabilités diversifiées et, comme l’ont exprimé les Évêques des États-Unis, on doit se concentrer “spécialement sur les besoins des pauvres, des faibles et des vulnérables, dans un débat souvent dominé par les intérêts les plus puissants”. Nous avons besoin de renforcer la conscience que nous sommes une seule famille humaine. Il n’y a pas de frontières ni de barrières politiques ou sociales qui nous permettent de nous isoler, et pour cela même il n’y a pas non plus de place pour la globalisation de l’indifférence. » (52)
 
Suis-je entraîné dans cette globalisation de l’indifférence?
 
(10e texte d'une série sur l'encyclique du pape François)

† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

mardi 1 septembre 2015

Dégradation humaine et sociale

« Si nous tenons compte du fait que l’être humain est aussi une créature de ce monde, qui a le droit de vivre et d’être heureux, et qui de plus a une dignité éminente, nous ne pouvons pas ne pas prendre en considération les effets de la dégradation de l’environnement, du modèle actuel de développement et de la culture du déchet, sur la vie des personnes. » Ce sont là des affirmations du pape François dans son encyclique sur l’écologie. Il explicite les graves conséquences de la dégradation de notre planète sur les humains et en donne de nombreux exemples. En voici quelques-uns.
 
Les effets humains de la croissance démesurée et désordonnée de beaucoup de villes sont multiples. On y est devant un chaos urbain, des problèmes de transport, et de la pollution visuelle ainsi que sonore. Souvent, on y consomme énergie et eau en excès. Certains quartiers sont congestionnés et désordonnés, sans espaces verts suffisants. « Les habitants de cette planète ne sont pas faits pour vivre en étant toujours plus envahis par le ciment, l’asphalte, le verre et les métaux, privés du contact physique avec la nature. » (44)
 
Certaines innovations technologiques ont des effets néfastes : exclusion sociale, inégalité dans la disponibilité et la consommation d’énergie et d’autres services, fragmentation sociale, augmentation de la violence, narcotrafic et consommation croissante de drogues chez les plus jeunes, la perte d’identité. On a là « des symptômes d’une vraie dégradation sociale, d’une rupture silencieuse des liens d’intégration et de communion sociale. » (45)
 
Et les communications par Internet « nous empêchent aussi parfois d’entrer en contact direct avec la détresse, l’inquiétude, la joie de l’autre et avec la complexité de son expérience personnelle. C’est pourquoi nous ne devrions pas nous étonner qu’avec l’offre écrasante de ces produits se développe une profonde et mélancolique insatisfaction dans les relations interpersonnelles, ou un isolement dommageable. » (46)
 
Notre monde de technologies et de communications nous offre de nombreux avantages. Mais voyons-nous assez leurs conséquences sur notre environnement et nos relations interhumaines?
 
(9e texte d'une série sur l'encyclique du pape François)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau