jeudi 29 août 2019

L’exemple des saintes et des saints

L’exemple premier et essentiel pour nous guider dans le chemin de la sanctification, c’est Jésus. Dans l’Évangile, nous le voyons, poussé sans cesse par l’Esprit Saint, cheminer « à travers villes et villages, prêchant et annonçant la Bonne Nouvelle du Royaume de Dieu » (Luc 8, 1). C’est ce que font à leur tour les Apôtres, après la résurrection de leur Seigneur. « Quant à eux, ils s’en allèrent proclamer partout l’Évangile. Le Seigneur travaillait avec eux et confirmait la Parole par les signes qui l’accompagnaient. » (Marc 16, 20)  Par l’Esprit, ils sont rivés à Jésus ressuscité et évangélisent sans arrêt.
 
Tout au long de l’histoire de l’Église, des témoins nous révèlent que leur rencontre intime avec Jésus les a poussés sur les grands chemins du monde. Il y a certes, les missionnaires célèbres : François Xavier, les Saints Martyrs Canadiens, des milliers d’autres au 20e s.. Les saintes et saints sont des modèles de vie chrétienne, charitable, apostolique. En les canonisant, l’Église tente de nous réveiller de notre sommeil et de nous arracher à notre paresse.
 
Ouvrons les yeux et les oreilles de notre cœur pour nous laisser émouvoir par ce qui se passe autour de nous : là aussi, l’Esprit fait surgir des saints et des saintes! De nombreux prêtres, religieuses, religieux et laïcs se consacrent à évangéliser et à servir avec fidélité, souvent en risquant leurs vies et toujours au prix de leur confort. « Leur témoignage nous rappelle que l’Église n’a pas tant besoin de bureaucrates et de fonctionnaires, que de missionnaires passionnés, dévorés par l’enthousiasme de transmettre la vraie vie. Les saints surprennent, dérangent, parce que leurs vies nous invitent à sortir de la médiocrité tranquille et anesthésiante. » (Pape François) (par. 138)
 
D’où l’exhortation si vive du pape : « Demandons au Seigneur la grâce de ne pas vaciller quand l’Esprit nous demande de faire un pas en avant; demandons le courage apostolique d’annoncer l’Évangile aux autres et de renoncer à faire de notre vie chrétienne un musée de souvenirs. De toute manière, laissons l’Esprit Saint nous faire contempler l’histoire sous l’angle de Jésus ressuscité. Ainsi, l’Église, au lieu de stagner, pourra aller de l’avant en accueillant les surprises du Seigneur. » (par. 139)
 
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau
(41e texte d’une série sur l’appel à la sainteté)

mardi 20 août 2019

Disciples de Jésus et avec son Esprit, osons évangéliser

Devenir un saint, une sainte, c’est marcher à la suite de Jésus. Sa compassion profonde « l’incitait à sortir de lui-même avec vigueur pour annoncer, pour envoyer en mission, pour envoyer guérir et libérer. » (Pape François) (par. 131) Ouvrons les Évangiles. Partout, on constate que l’audace et le courage sont les caractéristiques de sa vie itinérante et missionnaire.
 
C’est la mission de l’Esprit de nous rendre « comme » Jésus, de nous faire participer à sa détermination tendre et fervente pour proclamer l’Évangile. Il nous pousse à sortir de nos sécurités, à aller vers qui est en mal d’espoir, de ressources, de relations. Il faut, comme l’Église nous l’enseigne, supplier l’Esprit de venir et de nous relancer sans cesse à la suite de Jésus : « Viens, Esprit Créateur… »
 
La première communauté chrétienne connaissait ce besoin de l’Esprit et savait intensément l’appeler par la prière. Pierre est en prison. Les disciples sont paralysés par la peur du danger mortel qui les menace. Ils réagissent en priant : « Seigneur, sois attentif à leurs menaces : donne à ceux qui te servent de dire ta parole avec une totale assurance. Étends donc ta main pour que se produisent guérisons, signes et prodiges, par le nom de Jésus, ton Saint, ton Serviteur. » Quand ils eurent fini de prier, « le lieu où ils étaient réunis se mit à trembler, ils furent tous remplis du Saint-Esprit et ils disaient la parole de Dieu avec assurance. » (Actes des Apôtres 4, 29-31)
 
Il faut savoir reconnaître l’obstacle qui risque de nous faire tomber dans la médiocrité et de ne plus annoncer la Parole. « Nous avons en nous la tentation latente de fuir vers un endroit sûr qui peut avoir beaucoup de noms : individualisme, spiritualisme, repli dans de petits cercles, dépendance, routine, répétition de schémas préfixés, dogmatisme, nostalgie, pessimisme, refuge dans les normes. Peut-être refusons-nous de sortir d’un territoire qui nous était connu et commode. » (Pape François, par 134) Que l’Esprit nous pousse sans relâche « à nous déplacer pour aller au-delà de ce qui est connu, vers les périphéries et les frontières. Il nous conduit là où l’humanité est la plus blessée et là où les êtres humains, sous l’apparence de la superficialité et du conformisme, continuent à chercher la réponse à la question du sens de la vie. […] Jésus nous devance dans le cœur de ce frère, dans sa chair blessée, dans sa vie opprimée, dans son âme obscurcie. Il y est déjà. »
 
À nous d’y aller avec audace, de l’y reconnaître et de le servir : voilà notre chemin de sanctification! Et un jour, Jésus nous dira, à notre grand étonnement : « J’avais faim, et vous m’avez donné à manger; j’avais soif, et vous m’avez donné à boire; j’étais un étranger, et vous m’avez accueilli; j’étais nu, et vous m’avez habillé; j’étais malade, et vous m’avez visité; j’étais en prison, et vous êtes venus jusqu’à moi! » (Matthieu 25, 35-36)
 
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau
(40e texte d’une série sur l’appel à la sainteté)

dimanche 11 août 2019

La sainteté est "parresia" pour évangéliser

Que signifie ce mot étrange : parresia? Loin d’être rare dans les écrits apostoliques, ce mot peut se traduire par audace, mais peut évoquer aussi plusieurs comportements dynamiques dans la vie d’un disciple de Jésus. Le pape François l’emploie souvent, particulièrement dans son texte sur la sainteté (par. 129-139). « Audace, enthousiasme, parler en toute liberté, ferveur apostolique, tout cela est compris dans le vocable parresía, terme par lequel la Bible désigne également la liberté d’une existence qui est ouverte, parce qu’elle se trouve disponible à Dieu et aux autres (cf. Ac 4, 29; 9, 28; 28, 31; 2 Co 3, 12; Ep 3, 12; He 3, 6; 10, 19). » (par. 129)
 
La personne qui suit Jésus reçoit en son cœur l’ordre toujours actuel de Jésus Ressuscité : « De même que le Père m’a envoyé, moi aussi, je vous envoie. » (Jean 20, 21) Il souffle dans le cœur du croyant, de la croyante : « Recevez l’Esprit Saint. » Cette action de Jésus ressuscité, par laquelle il actualise sa promesse de présence avec les siens tous les jours, nous permet « de marcher et de servir dans cette attitude pleine de courage que suscitait l’Esprit Saint chez les Apôtres et qui les conduisait à annoncer Jésus-Christ. »
 
Un grand obstacle à l’évangélisation consiste dans le manque de parresía, de ferveur. C’est un engourdissement, une tiédeur qui vient du dedans et nous incite à nous endormir, nous ankyloser dans notre confort. C’est pourtant à tous ses disciples, donc à nous aujourd’hui qui voulons le suivre, que Jésus ordonne : « Avance au large, et jetez vos filets pour la pêche. » (Luc 5, 4) Attachés à Jésus, nous aurons le courage de mettre tous nos charismes au service des autres. Et l’Esprit saura bien faire résonner au fond de notre conscience cette parole qui a jailli du cœur de saint Paul : « Malheur à moi si je n'annonçais pas l’Évangile! » (1 Co 9,16)
 
Jésus doit être toujours notre modèle, notre guide, nous infusant sans cesse son Esprit. Sa compassion profonde ne le paralysait pas dans la peur. Elle l’incitait « à sortir de lui-même avec vigueur pour annoncer, pour envoyer en mission, pour envoyer guérir et libérer. Reconnaissons notre fragilité mais laissons Jésus la saisir de ses mains et nous envoyer en mission. Nous sommes fragiles mais porteurs d’un trésor qui nous grandit et qui peut rendre meilleurs et plus heureux ceux qui le reçoivent. L’audace et le courage apostoliques sont des caractéristiques de la mission. » (par. 131)
 
Quand une personne annonce l’Évangile avec une telle audace, c’est un signe que l’Esprit verse dans son cœur une confiance inébranlable dans la fidélité de Jésus et dans l’amour de Dieu pour elle. C’est ainsi que l’Esprit poursuit l’œuvre de Jésus dans notre monde, dans nos vies!
 
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau
(39e texte d’une série sur l’appel à la sainteté)

dimanche 4 août 2019

La personne sainte a le sens de l’humour

Consentir humblement et en paix à la vie avec son stress et ses heurts de toutes sortes est un don de Jésus qui vient pacifier les cœurs. Lui seul peut nous libérer « de cette agressivité qui jaillit d’un ego démesuré. » (pape François) (par. 121) Il est alors possible de vivre avec une belle assurance intérieure et de supporter les contradictions de toutes sortes.
 
« Ce qui a été dit jusqu’à présent n’implique pas un esprit inhibé, triste, aigri, mélancolique ou un profil bas amorphe. Le saint est capable de vivre joyeux et avec le sens de l’humour. Sans perdre le réalisme, il éclaire les autres avec un esprit positif et rempli d’espérance. » (par. 122)
 
Ordinairement, la joie chrétienne est accompagnée du sens de l’humour. Le pape François nous présente d’abord Thomas More comme un modèle de saint qui sait vivre avec humour. Il cite même intégralement une de ses prières pleines d’humour :
 
« Donne-moi une bonne digestion, Seigneur, et aussi quelque chose à digérer. Donne-moi la santé du corps avec le sens de la garder au mieux. Donne-moi une âme sainte, Seigneur, qui ait les yeux sur la beauté et la pureté, afin qu’elle ne s’épouvante pas en voyant le péché, mais sache redresser la situation. Donne-moi une âme qui ignore l’ennui, le gémissement et le soupir. Ne permets pas que je me fasse trop de souci pour cette chose encombrante que j’appelle “moi”. Seigneur, donne-moi l’humour pour que je tire quelque bonheur de cette vie et en fasse profiter les autres. » (source)
 
Le pape donne aussi en exemple saint Philippe Néri. Voici quelques traits de cet humour si souriant et si brûlant! À quelqu’un qui l’interroge sur l’opportunité de porter un cilice, il répond : « Certainement, mais au-dessus des vêtements ». À un autre qui l’entretient des transports mystiques d’une très pieuse jeune fille, il réagit : « Qu’on la marie! » (sens de l'humour)
 
Après son bref texte sur l’humour, le pape François revient sur la joie. C’est là un autre signe qu’est profondément ancrée dans son cœur la certitude que la joie est la caractéristique de la personne qui croit en Jésus et le suit.
 
Dieu « nous veut positifs, reconnaissants et pas trop compliqués. […] En toute circonstance, il faut garder un esprit souple. […] C’est ce que vivait saint François d’Assise, capable d’être ému de gratitude devant un morceau de pain dur, ou bien, heureux de louer Dieu uniquement pour la brise qui caressait son visage. » (par. 127)
 
Cette joie se vit non pas dans une consommation individualiste et égocentrique. Elle le vit dans la communion et le partage. « Dieu aime celui qui donne avec joie » (2 Corinthiens 9,7).
 
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau
(38e texte d’une série sur l’appel à la sainteté)