lundi 3 juin 2013

Sortir et aller vers…

C’est là une orientation que François aime répéter. Ce fut sa vie comme évêque en Argentine. Ça peut nous inspirer quoi?

Rencontrer Jésus, croire en lui, c'est communier au tourment de Dieu face aux détresses humaines. L'histoire du salut est celle des solidarités de Dieu avec les victimes de l'injustice sous toutes ses formes: Abel tué, l'esclave de Sara rejetée et son enfant mourant, Joseph vendu par ses frères, le peuple esclave en Égypte. Tendresse immense de Dieu pour les humains ! Le vrai Dieu, contrairement aux dieux liés à l'injustice et à l'inhumanité et qui réclament toujours larmes et sang, est le Dieu de la solidarité, de la justice et de la tendresse envers les humains.

Rencontrer Jésus et croire en lui, c'est communier avec lui au tourment de Dieu face à la détresse humaine, telle que ce tourment s'est révélé dans la vie, l'agonie et la croix de Jésus. Il a porté jusqu'au bout la solidarité du Père avec l'humanité. Il est devenu lui-même victime du rejet et de la marginalisation. Mais avant de mourir, il s'est identifié aux personnes affamées, malades, en prison. Et il a insisté sur l'unique commandement, qui joint inséparablement l'amour de Dieu et l'amour du prochain. La conséquence est que toute rencontre vraie de Jésus le Messie invite à communier à la passion, à l'angoisse, au souci de Dieu pour le monde.

Vatican II nous a fermement appelés à actualiser cette conviction dans le monde complexe où nous vivons. Il s’agit certes d’agir en direct et d’aider les victimes, les perdus, les étrangers qui ont faim, soif, qui sont seuls…. Mais l’appel évangélique nous demande aussi d’être très préoccupés par les structures mentales et sociales de notre société et de notre Église qui conduisent à des rejets, des jugements, des marginalisations.

Jésus nous a dit d’être le sel de la terre et la lumière du monde, par la qualité évangélique de notre vie et de notre témoignage, par notre présence dans ce monde, par nos engagements, par nos interventions sociales et politiques. Il faut vouloir et agir pour que les structures et les mœurs de notre société politique, économique, financière et sociale d'ici, et de notre Église concrète chez nous, deviennent de plus en plus celles de cette humanité rêvée par Dieu et pour laquelle il est allé jusqu’à livrer son Unique. Tisonnés et brûlés par cet amour de Dieu pour notre monde (Jean 3,16), comme Jésus le fut, il nous faut agir, aller vers les marges de la vie humaine.

† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau