vendredi 1 mars 2013

Vatican II : un nouveau style conciliaire (2e partie)

L’attitude, non pas de condamnations, mais de miséricorde, que Jean XXIII a demandée aux Pères conciliaires a exigé un changement très profond dans le style retenu et les valeurs mises en exergue.  John W. O’Malley, dans son livre L’événement Vatican II, a analysé ce changement qui a une portée considérable sur la capacité même de l’Église de parler au monde de ce temps pour en être compris. C’est cette insistance nouvelle qui a amené à parler d’un concile pastoral, ce qui ne signifie pas une opposition aux dogmes, mais met l’accent différemment.

Certains conciles antérieurs ont utilisé le style littéraire des confessions de foi, des bulles, des lettres, des récits historiques. Mais pour saisir la nouveauté de Vatican II, il faut noter que la majorité des conciles jusque-là se sont identifiés comme des instances législatives et judiciaires. Cette façon de saisir leur propre identité amenait un style juridique en vue de combattre les abus doctrinaux ou disciplinaires. Ces conciles ne cherchaient pas à faire de longs textes pour convaincre, mais au contraire des textes aussi concis que possible pour combattre efficacement les adversaires. C’étaient des canons visant à fournir des normes, à donner des sanctions, à censurer. Le style était celui des menaces, des intimidations, de la surveillance, de la punition. Ils se terminaient souvent par des excommunications. C’étaient en somme des instruments de contrainte venant d’un pouvoir supérieur cherchant à s’imposer à des inférieurs.

Vatican II s’est identifié comme une assemblée au service de l'Église et du monde. Le style fut en conséquence tout nouveau. Ce concile n’a formulé aucun canon. Ses seules condamnations furent contre la course aux armements et contre la prolifération des armes nucléaires. Les textes sont longs, même parfois poétiques. Ils offrent un idéal. Ils ne visent pas la contrainte, mais la persuasion et l’adhésion intérieure. Ce sont des invitations au dialogue visant la conversion, le changement des cœurs. Ce ne sont donc pas des commandes venant de haut, mais bien des paroles d’amis visant la réconciliation et la communion.
(32e texte d’une série sur Vatican II)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau