samedi 9 mars 2013

Vatican II : un vocabulaire nouveau

Jean XXIII a demandé aux Pères conciliaires de témoigner durant ce concile d’une attitude de miséricorde et non de sévérité. Il fut entendu et le vocabulaire utilisé a été choisi en conséquence. Y disparaissent les mots qui méprisent les autres, les anathématisent, les dénoncent. O’Malley classe ceux qui furent surtout utilisés en  cinq catégories :
1-     Les mots de l’égalité : Peuple de Dieu, frères et sœurs, sacerdoce des fidèles, collégialité. On vise donc ici des relations horizontales et non pas entre supérieur et inférieur.
2-     Les mots de la réciprocité : coopération, partenariat, collaboration, dialogue, conversation, amitié, fraternité.
3-     Les mots de l’humilité : Église pèlerine, servante. Ça s’oppose à une attitude de pouvoir voulant s’imposer.
4-     Les mots du changement : développement, progrès, évolution
5-     Les mots disant l’intériorité : charismes, joies et espoirs, peines et souffrances. Il faut mettre dans cette catégorie tout ce qui est dit dans ces textes sur la conscience, et aussi tous les appels à la sainteté, à la sanctification.

Une conséquence de ce changement de vocabulaire est que ces seize textes, même s'ils touchent des sujets tellement variés et  furent rédigés avec des mois et même quelques années d’intervalle, ont une cohérence étonnante.  C’est là le résultat d’un travail acharné pour sans cesse remettre l’œuvre sur le métier jusqu’à ce que la volonté de la communication de l’Évangile au monde de notre temps y soit transparente le plus possible. L’auteur ici cité soutient que c’est surtout dans ce genre littéraire, et les valeurs qu’il a incarnées, que l’on peut reconnaître ce qu’on a nommé : « l’esprit du concile ».

Car ce changement du vocabulaire indique un changement profond des valeurs retenues comme essentielles pour l’Église tant dans sa vie interne que par rapport au monde. Il s’agit d’un nouveau mode de réflexion, de sensibilité, d’action. C’est un appel à la conversion de tous les membres de l’Église et en particulier des  personnes qui y exercent un leadership. Par là, ce concile est essentiellement prophétique : il porte un fort appel au renouveau du cœur. L’Église est mise en demeure de chasser sa peur, sa haine, son ressentiment des autres, quels qu’ils soient. Le concile envoie donc un appel à la conscience de chaque membre de l’Église. Et reconnaissons que cet appel est toujours actuel (car que de tensions, de guerres dans notre humanité!) et qu’il rejoint le désir le plus profond du cœur humain : la soif intense d’unité dans la diversité et de la paix.
(33e texte d’une série sur Vatican II)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau