lundi 1 avril 2013

Vatican II : aggiornamento, développement, ressourcement

Ces trois termes ont quelque chose à voir avec une réforme de l’Église. Le terme aggiornamento vient de Jean XXIII et a particulièrement été invoqué pour décrire l’enjeu général du concile. En ouvrant le concile, ce pape a demandé que l’Église, sans négliger l’héritage reçu, doit aussi se tourner vers les temps présents, les nouvelles situations, les nouvelles formes de vie ouvrant de nouvelles voies à l’apostolat. Il s’agit d’un regard sur le présent et de la capacité de l’Église de s’adapter au monde moderne, à certaines de ses valeurs et options culturelles.

Le concept de développement de la doctrine pour sa part oriente vers l’avenir dans une perspective de continuité. Il s’agit de clarifier la doctrine pour en tirer toutes les richesses. C’est donc «la continuation du mouvement sur un chemin donné », un progrès dans le sens d’une plus grande clarification. Toutefois, sur certains sujets comme la liberté religieuse et les relations entre l’Église et l’État, la doctrine défendue semblait aux opposants ne pas aller dans le bon chemin, car abandonnant le chemin traditionnel et même prenant un chemin explicitement interdit par les papes récents.

Pour aller au bout du développement de la doctrine, il fallait un retour aux sources (ressourcement). Ce  regard vers le passé s’avérait nécessaire pour apporter des changements au présent. Il fallait questionner d'une façon neuve les Saintes Écritures et les Pères de l’Église. Ces recherches étaient déjà en marche depuis plusieurs années et entraient maintenant au concile. On se sert donc du passé pour juger le présent, avec une insistance cette fois sur la rupture, ou du moins la nécessité d’apporter corrections, nuances aux orientations du présent.

Ce triple dynamisme, orientant respectivement vers le présent, le futur et le passé, a marqué profondément Vatican II. Alors, comment qualifier ce concile? Benoît XVI  propose de le lire selon « l’herméneutique de la réforme », qu’il oppose  à « l’herméneutique de la discontinuité et de la rupture ». Il s’agit « du renouveau dans la continuité de l'unique sujet-Église, que le Seigneur nous a donné; c'est un sujet qui grandit dans le temps et qui se développe, restant cependant toujours le même, l'unique sujet du Peuple de Dieu en marche. » Le pape en appelle à une grande fidélité à l’Esprit pour ramener l’Église aux principes fondamentaux de la tradition chrétienne et ainsi pouvoir affronter le présent et l’avenir.

Le Père Cantalamessa, prédicateur de la maison pontificale, dans sa seconde homélie de l’Avent 2012 (« Une clé de lecture ») traitait de cette même question en offrant une lecture pneumatique du concile. Il résume la position des papes, de Jean XXIII à Benoît XVI, en parlant de «  la nouveauté dans la continuité ». Et il ajoute que le concile marque une rupture par rapport au passé récent mais une continuité avec le passé lointain. Enfin il présente l’Esprit-Saint comme la clé de lecture de Vatican II : « Qu’est-ce qui permet de résoudre le paradoxe et de parler de nouveauté dans la continuité et de permanence dans le changement, sinon l’action de l’Esprit Saint dans l’Église ? » Et il insiste sur ce fruit qu’est une nouvelle qualité de vie chrétienne dans de nombreux secteurs ecclésiaux.

Nous sommes conviés à continuer notre découverte de ce trésor qu’est Vatican II pour l’Église et le monde, et à vivre des fruits de l’Esprit toujours croissants, malgré les hivers que semble souvent travers notre vie en Église.
(36e texte d’une série sur Vatican II)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau