vendredi 5 avril 2013

Vatican II : des semences en germination (1er partie)

Les seize documents produits par ce concile sont de généreuses semailles livrées à l’Église et à notre monde.  Ces semences ont déjà germé d’une façon très variable. Certaines ont déjà donné de beaux fruits. D’autres sont en germination. D’autres encore semblent en hibernation. On peut donc penser que ce concile continuera à travailler du dedans notre Église pendant des générations.

Quelques questions peuvent nous guider dans une tentative d'inventaire. Qu’est-ce que ma propre expérience actuelle doit au concile? Qu’avons-nous, comme paroisses, diocèses, au niveau universel, assimilé de Vatican II? Qu’est-ce qui est en fait appliqué et actualisé dans notre vie chrétienne? Est-ce que ça concerne surtout notre vision profonde des réalités en question ou plutôt les lois, codes et règles de conduite? Qu’est-ce qui nous rejoint de Vatican II? Qu’est-ce qui nous laisse indifférents ou nous indispose? Le concile a-t-il suscité un dynamisme nouveau? Une sainteté renouvelée? A-t-il mis en mouvement des forces latentes, des énergies endormies ou assoupies depuis peut-être des siècles?

Les évêques en concile ont cherché à éclairer les grandes questions abordées en retrouvant leurs enracinements dans le mystère de la Sainte Trinité. Il y a là une richesse mystique et pastorale inouïe. Car on nous offre une vision intégrée de l’histoire du salut et de son actualité jusque dans ses racines ultimes : le mystère de Dieu Père, Fils et Esprit, dans une communion ineffable d’amour intime et avec ce monde.

Les travaux conciliaires ont affirmé le caractère central de la Parole de Dieu, en particulier dans le document sur la Révélation divine et sur sa transmission.  Il s’agit de la communication de Dieu dans le monde. C’est l’horizon fondamental de toute l’histoire humaine, de toute l'histoire de l’Église et de notre destinée finale. Nous avons encore beaucoup à assumer dans ce domaine pour actualiser dans la vie quotidienne de l’Église et de ses membres ce que le concile a voulu. Mais je pense que l’orientation est donnée et continuera son chemin dans les cœurs et les vies.

Accueillant la Parole de Dieu sous ses diverses formes, ce que Benoît XVI a appelé une symphonie, nous percevons que l’Église n'existe pas pour elle-même. Elle est essentiellement missionnaire. Elle existe pour refléter la lumière du Christ au monde.  Les élaborations sur l’Église sont particulièrement importantes. Nous n’avons pas encore  assimilé et traduit dans nos vies les perceptions de l’Église comme mystère, comme Peuple de Dieu et Corps du Christ. Le fait d’avoir développé ces aspects fondamentaux avant de traiter de la hiérarchie et des diverses catégories de fidèles comporte des richesses encore inexplorées. Mais il est important de retenir que le passage d’une vision de l’Église société parfaite à une vision de l’Église communion est fondamental et porte déjà des fruits en incitant à creuser et à vivre les aspects plus intimes, intérieurs, spirituels et mystiques de la vie ecclésiale.

Cela va dans le sens de ce qui fut donné comme orientation par Jean XXIII et visé par le concile. Car l’Église en concile voulait alors enclencher un processus de conversion évangélique des cœurs. On y a affirmé très fermement que la sainteté n’est pas réservée à quelques personnes, mais qu’elle est la vocation de tous les baptisés. Ce qui exige une réforme des vies, des communautés ecclésiales diverses. Et pour y parvenir il faut aussi penser à une réforme du culte, des institutions, de la manière d’exposer la doctrine et surtout un retour aux Écritures.
(37e texte d’une série sur Vatican II)
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau