samedi 14 décembre 2013

L’esclavage chez nous

J’ai longtemps pensé que l’esclavage était une vieille histoire, que c’était fini dans notre monde civilisé. Mais je lisais récemment avec stupeur qu’il y a aujourd’hui beaucoup plus d’esclaves qu’autrefois. On parle de trente millions de personnes tenues en esclavage. On fait quoi avec ces personnes réduites à la condition de « choses » à exploiter impunément?  Des enfants-soldats, de forçats exploités pour travailler ou pour mendier, mais surtout des femmes et enfants prostitués.
 
Et ce qui est terrible, cet esclavage « est devenu une chose normale, une chose acceptée, car désormais le fait qu’une personne puisse être vendue ou achetée fait partie de la culture ». C’est ce qu’a déclaré Sœur Eugenia Bonetti, Prix du citoyen européen 2013.
 
Et ça se passe aussi chez nous. On affirme que Montréal est la capitale du tourisme sexuel. Sans parler de l’esclavage sexuel, il y aurait plus de 6000 esclaves au Canada.
 
Une des causes de cette situation est l’extrême pauvreté qui sévit dans de multiples populations de la terre. Mais il faut aussi voir l’appât effréné du gain dans le cœur des personnes qui exploitent ces formes d’esclavage parmi nous, et de celles qui cherchent à en profiter. Ce sont là de graves négations de la dignité de toute personne humaine. Notre inconscience ou notre indifférence joue aussi en faveur de tels drames, dont nous sommes sans doute complices, comme en ce qui concerne les vêtements que nous portons.
 
Nous approchons de Noël. Nous y reconnaissons dans la foi que Jésus, c’est Dieu qui a pris notre condition humaine, proclamant par le fait même la dignité de toute personne humaine. Il est venu partager nos esclavages pour nous en libérer. C’est un bon moment pour réfléchir seul ou en communauté et prendre conscience de ces terribles réalités et comment nous nous y situons comme disciples de Jésus. Suivons-nous ses traces aujourd’hui? Notre pape François aussi nous montre le chemin vers ces esclaves de la peur, de l’exploitation et de notre indifférence.
 
Noël nous invite à une fraternité et à une solidarité renouvelées et actives avec nos frères et sœurs les humains répartis sur cette planète qui est destinée à être une demeure et un lieu de liberté pour chaque personne humaine. Quels gestes puis-je faire en ce sens?
 
† Roger Ébacher
Archevêque émérite de Gatineau