lundi 31 juillet 2017

Les formes modernes d’esclavage

Les connaissons-nous? Reconnaissons-nous leur gravité, leur capacité d’avilissement des personnes et de corruption de nos sociétés? Savons-nous que ce sont là des crimes contre l’humanité?
 
En voici une courte liste : la traite et le trafic de personnes, les enfants soldats et les nouvelles formes d’esclavage comme le travail forcé, la prostitution, le trafic d’organes, le commerce de la drogue, le crime organisé. Ce sont là de véritables crimes contre l’humanité. Le pape François le rappelait aux juges, leur demandant de lutter avec fermeté et courage contre ces maux, se gardant de se laisser corrompre.
 
Il est aussi important de réfléchir sur les objectifs du développement durable et intégral votés par les 193 pays de l’ONU, visant 2030. On y lit entre autres la cible 8.7 : « Prendre des mesures immédiates et efficaces pour supprimer le travail forcé, mettre fin à l’esclavage moderne et à la traite des êtres humains, interdire et éliminer les pires formes de travail des enfants, y compris le recrutement et l’utilisation d’enfants soldats et, d’ici à 2025, mettre fin au travail des enfants sous toutes ses formes ».
 
Notre pays s’y est aussi engagé. Est-ce que ça me concerne? Que puis-je faire pour aider à nous sensibiliser à ces questions si douloureuses et actuelles? En parler au député? Échanger avec des gens de ma famille, de mon milieu, mes enfants, à l’école? Ou encore? De tels drames doivent tisonner notre créativité! Comment puis-je œuvrer pour ouvrir de nouveaux chemins à la dignité humaine et à la paix?
 
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau

samedi 29 juillet 2017

Jésus connaît la souffrance des familles

Les récits évangéliques nous montrent Jésus se faire sans cesse proche des familles, de leurs souffrances, de leurs défis. Le pape François le note dans son texte intitulé : La joie de l’amour (par. 21). On y trouve les références aux divers textes ici commentés).
 
Jésus lui-même naît dans une famille modeste qui bientôt doit fuir vers une terre étrangère. Enfant, il a donc vécu avec Marie et Joseph comme un réfugié en Égypte, avec les souffrances qu’une telle situation inflige à une famille. Puis il a grandi dans un village obscur, avec d’autres enfants d’humbles familles. Un jour, il a mis sa famille en crise en affirmant que sa priorité était de rester dans la demeure de son Père du ciel : parole qui fut bien obscure et troublante pour ses parents. Il a connu la nécessité de gagner la vie de la famille. Il a vécu bien des tensions avec sa parenté proche.
 
Jésus est entré dans la maison de son ami le pêcheur Pierre, où la belle-mère de celui-ci est malade. On y voit sa sollicitude pour aider le couple plongé dans une situation angoissante.
 
Jésus se laisse impliquer dans le drame de la mort dans la maison de Jaïre. Il sent dans son cœur la souffrance de ce père alors que sa jeune fille est mourante. Jésus y va et pose le geste qu’il peut pour refaire cette famille, lui redonner de l’espoir. C’est aussi ce qu’il fait pour Marthe et Marie prises dans le deuil de leur frère Lazare qui vient de mourir. Elles l’appellent et l’attendent avec anxiété. Il se rend dans leur maison. Il les soutient, les console, redonne vie à cette famille.
 
Jésus écoute le cri désespéré d’une veuve du village de Naïn qui porte en terre son fils unique. Il ressent jusque dans le frémissement de ses entrailles le drame de cette famille décimée. Il se fait proche, touche le cercueil, redonne la vie à l’enfant et à sa mère le goût et le courage de continuer à vivre. Jésus, de même, écoute la clameur du père de l’épileptique dans un petit village bien modeste.
 
Jésus rencontre des publicains comme Matthieu ou Zachée dans leurs propres maisons. Il accueille des pécheresses comme la femme qui a fait irruption dans la maison du pharisien. Sans cesse, il va là où un couple, une famille souffre. Il va vers, il accueille, il se fait présent dans les lieux où habitent les gens, où ils vivent leurs joies et leurs souffrances, là où se nouent et se dénouent tant de drames conjugaux, familiaux, humains.
 
Jésus connaît les angoisses et les tensions des familles qu’il introduit dans ses paraboles : des enfants qui abandonnent la maison familiale pour tenter une aventure; des enfants difficiles, aux comportements inexplicables ou victimes de la violence. Il s’intéresse aux noces qui courent le risque d’être honteuses par manque de vin ou par l’absence des invités.
 
Jésus est proche aujourd’hui de tous ces maux qui frappent tant de couples, de familles, au long de jours et des saisons de la vie. Il faut le supplier d’y venir, d’y mettre en œuvre sa bonté, sa miséricorde, sa tendresse. Il le peut et il le veut, car il connaît toutes nos fragilités, mais aussi toutes nos aspirations à aimer vraiment et à vivre.
 
Il est bon de situer Jésus dans la longue histoire des familles dans la Bible. C’est ce que fait un texte intéressant auquel je vous réfère.
 
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau
(5e texte d’une série sur La joie de l’amour)

jeudi 13 juillet 2017

Le couple humain, image de Dieu

Un jour, Jésus rappelle à ses interlocuteurs ce que nous risquons parfois d’oublier et qui est le sens même du couple humain : « N'avez-vous pas lu que le Créateur, dès l'origine, les fit homme et femme? » (Matthieu 19, 4) C’est bien ce qu’enseigne le début de la Bible : « Dieu créa l'homme à son image, à l'image de Dieu il le créa, homme et femme il les créa. » (Genèse 1,27)
 
Le pape François, dans son magnifique texte intitulé La joie de l’amour, commente : « Les deux grandioses premiers chapitres de la Genèse nous offrent l’image du couple humain dans sa réalité fondamentale. Dans ce texte initial de la Bible brillent certaines affirmations décisives. » (par. 10)
 
Et il précise : « Le couple qui aime et procrée est la vraie “sculpture” vivante (non pas celle de pierre ou d’or que le Décalogue interdit), capable de manifester le Dieu créateur et sauveur. C’est pourquoi l’amour fécond arrive à être le symbole des réalités intimes de Dieu. » (par. 11) Ainsi, la relation féconde du couple devient une image qui oriente notre méditation vers le mystère de Dieu amour et vie, donateur généreux de vie. « Le Dieu Trinité est communion d’amour, et la famille est son reflet vivant. » Le Dieu auquel croient les chrétiens, dans son mystère le plus intime, est une famille, « puisqu’il porte en lui-même la paternité, la filiation et l’essence de la famille qu’est l’amour. »
 
Il faut admirer le couple humain dans son visage lumineux. Pensons à la relation directe – les yeux dans les yeux –, à cette rencontre avec « un visage, un “tu” qui reflète l’amour divin. » C’est ce qu’exprime admirablement la femme du Cantique des Cantiques dans une merveilleuse profession d’amour et de don réciproque : « Mon bien-aimé est à moi, et moi à lui […]. Je suis à mon bien-aimé, et mon bien-aimé est à moi! » (2, 16; 6, 3).
 
Pensons aussi à la beauté de la procréation et de la famille. Dans la Bible, l’union matrimoniale est évoquée à la fois dans sa dimension sexuelle et corporelle et aussi en tant que don volontaire d’amour : étreinte physique et union des cœurs et des vies. En jaillit la famille, construite de pierres vivantes. « La présence d’enfants est, de toute manière, un signe de plénitude de la famille, dans la continuité de la même histoire du salut, de génération en génération. » (par. 14)
 
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau
(4e texte d’une série sur La joie de l’amour)

vendredi 7 juillet 2017

La famille dans la Bible

Comme le note le pape François dans son document sur le couple et la famille (La joie de l’amour), « la Bible abonde en familles, en générations, en histoires d’amour et en crises familiales. » (par. 8) Elle est remplie de méditations, d’instructions, de récits très réalistes, de poésie aussi sur cette double réalité humaine fondamentale.
 
Dès les premières pages de la Bible, on rencontre la famille d’Adam et d’Ève. De page en page, on découvre un cortège ininterrompu d’alliances et de noces, de joies et de peines, de tendresses et de violences, de paix mais aussi de sang, qui caractérise la force de la vie qui continue ainsi son chemin de génération en génération.
 
Dieu crée l’humanité, homme et femme, à son image. Ainsi le couple humain devient co-créateur. Et « la capacité du couple humain à procréer est le chemin par lequel passe l’histoire du salut. » (par. 11)
 
La Parole de Dieu évoque l’union matrimoniale « non seulement dans sa dimension sexuelle et corporelle, mais aussi en tant que don volontaire d’amour. L’objectif de cette union est “de parvenir à être une seule chair”, soit par l’étreinte physique, soit par l’union des cœurs et des vies et, peut-être, à travers l’enfant qui naîtra des deux et portera en lui, en unissant, non seulement génétiquement, mais aussi spirituellement, les deux “chairs”. » (par. 13)
 
La présence d’enfants est interprétée dans la Bible comme un signe de plénitude de la famille. Par eux se tissent des liens entre les générations et s’affirme une ouverture sur l’avenir de la vie.
 
L’Évangile nous rappelle également que les enfants ne sont pas une propriété des parents : ils ont devant eux leur propre chemin de vie. Nous voyons Jésus obéissant à ses parents terrestres, mais aussi prenant ses distances d’eux. À Marie et Joseph qui sont étonnés devant le fait qu’il reste à Jérusalem après le pèlerinage annuel (cf. Lc 2, 51), Jésus affirme que sa vocation personnelle exige une séparation de ses parents. Il a une mission à accomplir hors de sa famille.
 
Dans la Bible, la Parole de Dieu nous aide à percevoir des dimensions profondes et parfois secrètes du mystère du couple et de la famille.
 
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau
(3e texte d’une série sur La joie de l’amour)