Par le titre même de son exhortation apostolique, La joie de l'Évangile, François nous
dit qu’il accorde une très grande place dans son programme pour toute l’Église
à cette émotion profonde, à cette jouissance paisible de l'âme qui
transforme la vie. Les premières lignes de son texte le confirment :
« La joie de l’Évangile remplit le cœur et toute la vie de ceux qui rencontrent Jésus. Ceux qui se
laissent sauver par lui sont libérés du péché, de la tristesse, du vide
intérieur, de l’isolement. Avec Jésus Christ la joie naît et renaît
toujours. » (par. 1) Il ajoute qu’il invite tous les fidèles « à une
nouvelle étape évangélisatrice marquée par cette joie. »
Cette
joie est la réponse apportée par le discernement spirituel et pastoral du
pape, qui, ne l’oublions pas, est un jésuite disciple de saint Ignace :
« Le grand risque du monde d’aujourd’hui, avec son offre de consommation
multiple et écrasante, est une tristesse individualiste qui vient du cœur bien
installé et avare, de la recherche malade de plaisirs superficiels, de la
conscience isolée. Quand la vie intérieure se ferme sur ses propres intérêts,
il n’y a plus de place pour les autres, les pauvres n’entrent plus, on n’écoute
plus la voix de Dieu, on ne jouit plus de la douce joie de son amour,
l’enthousiasme de faire le bien ne palpite plus. » (par. 2)
Ainsi
beaucoup « se transforment en personnes vexées, mécontentes, sans vie. Ce
n’est pas le choix d’une vie digne et pleine, ce n’est pas le désir de Dieu
pour nous, ce n’est pas la vie dans l’Esprit qui jaillit du cœur du Christ
ressuscité. »
Ce
diagnostic produit par le discernement spirituel de François me pose bien des
questions. Est-ce que j’y reconnais quelques traits du monde où je vis ?
Sur quoi m’ouvre-t-il les yeux, que je n’avais pas remarqué auparavant?
Et moi,
quelle est la qualité, la profondeur, la puissance dynamique de ma joie ?
Ou suis-je submergé par l’inquiétude et la peur ? Ai-je « un air de
Carême sans Pâques » ? (par. 6)
Quelle
prière ça suscite en moi ? Je reprends le cri du psalmiste :
« Rends-moi la joie d'être sauvé ; que l'esprit
généreux me soutienne. »
(2e texte d’une série sur la joie)
† Roger ÉbacherÉvêque émérite de Gatineau