Le pape François aime rencontrer les gens, se faire proche, les embrasser, les prendre dans ses bras. Il se situe ainsi dans ce
qu’il considère comme une caractéristique de notre époque. Le pape a conscience
qu’en agissant ainsi, il suit Jésus, il développe en lui et autour de lui les
relations mêmes que Jésus engendrait lorsqu’il marchait sur notre terre. Il
sait dans sa foi que c’est Jésus ressuscité qui continue en lui, par son Esprit
son œuvre de créer la communauté des enfants de Dieu. Le pape sait aussi donner
sens à ses gestes en les situant dans la culture contemporaine. Dans son
texte-programme La joie de l’Évangile
(EG 87), il développe cette idée et l’applique à la vie de tout
disciple-missionnaire.
« De nos jours, alors que les réseaux et les
instruments de la communication humaine ont atteint un niveau de développement
inédit, nous ressentons la nécessité de découvrir et de transmettre la
“mystique” de vivre ensemble, de se mélanger, de se rencontrer, de se prendre
dans les bras, de se soutenir, de participer à cette marée un peu chaotique qui
peut se transformer en une véritable expérience de fraternité, en une caravane
solidaire, en un saint pèlerinage. Ainsi, les plus grandes possibilités de
communication se transformeront en plus grandes possibilités de rencontre et de
solidarité entre tous. Si nous pouvions suivre ce chemin, ce serait une très
bonne chose, très libératrice, très génératrice d’espérance! Sortir de soi-même
pour s’unir aux autres fait du bien. S’enfermer sur soi-même signifie goûter au
venin amer de l’immanence, et en tout choix égoïste que nous faisons,
l’humanité aura le dessous. »
Par ses exemples comme par son enseignement, le pape François
montre ce que doit être un disciple-évangélisateur : quelqu’un qui dépasse
le soupçon, le manque de confiance permanent, la peur d’être envahi, les
comportements défensifs. « L’Évangile nous invite toujours à courir le
risque de la rencontre avec le visage de l’autre, avec sa présence physique qui
interpelle, avec sa souffrance et ses demandes, avec sa joie contagieuse dans
un constant corps à corps. La foi authentique dans le Fils de Dieu fait chair
est inséparable du don de soi, de l’appartenance à la communauté, du service,
de la réconciliation avec la chair des autres. Dans son incarnation, le Fils de
Dieu nous a invités à la révolution de la tendresse. » (EG 88)
La relation personnelle, constante, entretenue avec le Dieu
Père et Amour et avec Jésus le Fils fait chair provoque chez le
disciple-missionnaire l’élan pour relever le défi de ne jamais fuir une
relation personnelle et engagée avec Dieu, et qui engage en même temps avec les
autres. « L’unique voie consiste dans le fait d’apprendre à rencontrer les
autres en adoptant le comportement juste, en les appréciant et en les acceptant
comme des compagnons de route, sans résistances intérieures. Mieux encore, il
s’agit d’apprendre à découvrir Jésus dans le visage des autres, dans leur voix,
dans leurs demandes. C’est aussi apprendre à souffrir en embrassant Jésus
crucifié quand nous subissons des agressions injustes ou des ingratitudes, sans
jamais nous lasser de choisir la fraternité. » [EG 89]
La vie du disciple-missionnaire est tissée de relations. Un
tel disciple doit savoir regarder la grandeur sacrée du prochain, découvrir
Dieu en chaque être humain. Il le pourra en s’accrochant à Jésus ressuscité qui
sait par son Esprit ouvrir le cœur à l’amour divin que lui-même a manifesté
jusqu’au don suprême de sa vie.
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau