Le sujet fut traité très vigoureusement par le pape
François lors de son voyage en Bolivie. Dans un discours percutant aux
mouvements populaires, il affirme leurs rôles irremplaçables pour analyser
les structures qui détruisent « la fraternité, l’entraide, l’engagement,
la soif de justice. » Il les appelle à continuer à s’engager dans un
mouvement de conversion des cœurs. Il faut s’engager dans une globalisation de l’espérance!
Sa description de la situation est implacable.
« On est en train de causer des dommages peut-être irréversibles à
l’écosystème. On est en train de châtier la terre, les peuples et les
personnes de façon presque sauvage. Et derrière tant de douleur, tant de mort
et de destruction, on sent l’odeur de ce que Basile de Césarée – l’un des
premiers théologiens de l’Église — appelait “le fumier du diable”; le désir
sans retenue de l’argent qui commande. […] Cela ruine la société, condamne
l’homme, le transforme en esclave, détruit la fraternité entre les hommes,
oppose les peuples les uns aux autres, et comme nous le voyons, met même en
danger notre maison commune, la sœur et mère terre. »
Que peut-on y faire? Entrer dans un processus de
changement des cœurs. « Quand nous regardons le visage de ceux qui
souffrent, le visage du paysan menacé, du travailleur exclu, de l'indigène
opprimé, de la famille sans toit, du migrant persécuté, du jeune en chômage, de
l'enfant exploité, de la mère qui a perdu son fils dans une fusillade parce que
le quartier a été accaparé par le trafic de stupéfiants, du père qui a perdu sa
fille parce qu'elle a été soumise à l'esclavage; quand nous nous rappelons ces “‘visages
et ces noms”’, nous sommes profondément bouleversés face à tant de douleur et
nous sommes émus, nous sommes tous émus. » Non pas par des statistiques,
mais par les blessures, nos blessures dans notre chair.
Et le pape assigne comme tâche aux mouvements
populaires de « mettre l'économie au service des peuples : les
êtres humains et la nature ne doivent pas être au service de l'argent. Disons
NON à une économie d'exclusion et d'injustice où l'argent règne au lieu de
servir. Cette économie tue. Cette économie exclut. Cette économie détruit la
Mère Terre. » Il faut la transformer. « L'économie ne devrait pas être un mécanisme d'accumulation,
mais l'administration adéquate de la maison commune. Cela implique de prendre
jalousement soin de la maison et de distribuer convenablement les biens entre
tous. »
Pour un chrétien, c’est un commandement de
travailler à une juste distribution des biens.
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau