Le
pape François a écrit en mars une lettre au Cardinal Ouellet qui est très inspirante,
qui est aussi capable de nous juger et de nous conduire à la conversion. Il y
traite de l’Église comme peuple de Dieu, image biblique reprise par Vatican II.
Le pape développe en particulier la liberté et la responsabilité des laïcs face
au monde dans ses diverses composantes. Il insiste aussi pour que les prêtres, les
évêques, les agents de pastorale respectent et promeuvent cette place des laïcs
ainsi que leur responsabilité missionnaire. Je vais présenter cette lettre par
petites tranches. Aujourd’hui, je cite le paragraphe qui nous demande de
méditer sur le baptême, sa place première et irremplaçable dans la
communauté chrétienne, sur ses effets.
« Regarder
le peuple de Dieu signifie rappeler que nous faisons tous notre entrée dans
l’Église en tant que laïcs. Le premier sacrement, celui qui scelle pour
toujours notre identité et dont nous devrions toujours être fiers, est le
baptême. À travers lui et avec l’onction de l’Esprit Saint (les fidèles) “sont
consacrés pour être une demeure spirituelle et un sacerdoce saint” (Lumen Gentium, n. 10). Notre consécration première et fondamentale est le fruit spirituel
et pastoral de notre baptême. »
S’adressant
particulièrement aux personnes ordonnées, le pape ajoute avec fermeté et
peut-être un peu d’humour : « Personne n’a été baptisé prêtre ni
évêque. Ils nous ont baptisés laïcs et c’est le signe indélébile que personne
ne pourra jamais effacer. Cela nous fait du bien de nous rappeler que l’Église
n’est pas une élite de prêtres, de personnes consacrées, d’évêques, mais que
nous formons tous le saint peuple fidèle de Dieu. Oublier cela comporte
plusieurs risques et déformations dans notre expérience, à la fois personnelle
et communautaire, du ministère que l’Église nous a confié. »
Il
faut parler du peuple de Dieu en « nous » et non pas en
« eux » ou « ils ». « Nous sommes, comme le souligne
bien le Concile Vatican II, le peuple de Dieu, dont l’identité est “la dignité
et la liberté des fils de Dieu, dans le cœur desquels demeure l’Esprit Saint,
comme dans un temple” (Lumen Gentium, n. 9). Le saint peuple fidèle de Dieu est
oint par la grâce de l’Esprit Saint, et c’est pour cela qu’au moment de
réfléchir, de penser, d’évaluer, de discerner, nous devons être très attentifs
à cette onction. »
Quel
rappel salutaire que cet enseignement sur la valeur fondatrice du baptême pour
toute la communauté, insérant chaque nouveau baptisé dans cette famille des
enfants de Dieu! Cette appartenance est notre dignité foncière, essentielle. Il
faut nous le rappeler, car nous sommes toujours tentés,
que nous soyons évêques, prêtres ou laïcs agents de pastorale, de porter un
regard clérical sur nos communautés. Une telle approche cléricale risque de
stériliser les dynamismes semés par l’Esprit dans chaque baptisé en vue de la
mission de miséricorde et de vie dans le monde.
† Roger Ébacher
Évêque émérite de Gatineau